Novembre 2008 : La reproduction sonore en haute-fidélité est une passion dangereuse.


La quête qu'est la perfection sonore est sans fin.


En réfléchissant, nous dépensons beaucoup d'énergie de savoir et d'argent pour en finalité n'envoyer que des vibrations d'air vers nos oreilles. Plutôt, devrai-je dire, vers notre système auditif.


Réussir à tromper nos facultés naturelles, originellement prévues pour notre survie, de manière à leur faire croire qu'un orchestre est dans votre salon ou mieux, que vous êtes soudainement transporté dans une salle de concert : c'est devenu possible.


La plupart des enregistrements de musique acoustique ou de concerts sont enregistrés avec un respect de l'image sonore. Fini le temps des débuts de la stéréo où le train passait de l'enceinte gauche à celle de droite pour démontrer les possibilités de la stéréophonie. Les nouveaux enregistrements (à condition qu'ils soient bons) procurent une écoute globale dans laquelle est souvent prise en compte la nature acoustique même du local. Vous entendez ainsi, atténués et avec un certain retard témoin de la distance, sur l'enceinte de droite les sons réverbérés du piano situé à gauche.


La restitution de cette image par la chaîne de reproduction est maintenant largement prise en compte par les concepteurs d'amplis ou de lecteurs CD. Peut-être même un peu trop car elle est devenue synonyme d'audiophilie et à ce titre très "vendeuse". C’est notre constatation car nous entreprenons depuis peu des écoutes de différents amplificateurs sur nos enceintes JCT Heritage. Ces enceintes ont la particularité d'avoir été conçues en tenant compte beaucoup plus des spécificités de l'oreille humaine et de sa sensibilité prédominante aux impulsions et au traînage. De plus, leur système de charge apériodique qui supprime les “pics de résonance“ de la cavité au profit d'une réverbération contrôlée assure une restitution très réelle de l'image présente sur l'enregistrement.


Ce dont il faut convenir, c'est qu'il ne faut pas créer de l'image pour un disque qui n'en possède pas. Pour obtenir une écoute vraiment “fidèle“ il faut que la chaîne soit transparente. Je sais que ce mot est très galvaudé et que j'ai au moins dix clients par jour qui nous appellent en nous disant que leur chaîne est très transparente, mais qui néanmoins désirent changer leurs câbles. La transparence est obtenue quand la chaîne s'efface devant l'enregistrement.


Pendant de nombreuses années j'ai eu la chance de pouvoir écouter gracieusement plusieurs dizaines de CD par mois afin d'établir une cotation technique de l'enregistrement pour un magazine de musique assez connu. J'ai parfois fait des erreurs, car mon équipement de reproduction (que j'améliorais au fur et à mesure) me donnait une restitution élégamment déformée. J'ai ainsi bien côté certains disques que je regrette aujourd'hui et de même “saqué“ d'honnêtes enregistrements. J'ai mis plusieurs années à trouver une configuration qui me place en ligne directe avec l'enregistrement à nu. Cette position de critique technique m'a considérablement apporté pour le reste de ma vie professionnelle. Elle m'a quelque part révélé une forme de vérité. Ainsi j'ai appris à relativiser le type de prise de son dans mon évaluation des éléments qui la restituent.
Dans la crédibilité d'une image stéréophonique interviennent plusieurs facteurs. En ce qui concerne les câbles, ils peuvent intervenir principalement par leur restitution de l'équilibre tonal. Dans le passé certains d'entre vous se sont trouvés acquéreurs de câbles retenus pour leur dynamique. Il s'agissait souvent de structures combinées à gros brins genre Leedh, Vecteur ou bien Kimber. Ces câbles restituaient d'une manière saisissante un haut médium qui enjolivait les “grattes“ de guitare avec un grand réalisme. L'enthousiasme passé, et bien-sur compte-tenu des amplis et des enceintes utilisés, les mélomanes s'apercevaient que ces câbles leurs avaient avancé la scène sonore et occulté des informations d'ambiance. A l'inverse, ceux qui avaient choisi des câbles à brins nombreux et fins genre Supra Ply ou Monitor-Cable adoucissaient le rendu avec un léger tassement de la dynamique et un scène en arrière.

Toutes ces informations doivent bien-sur être relativisées car selon les “couplages“ des phénomènes de compensations interviennent. Kimber avec A&R, Rogers ou Spendor (bas rendement) fonctionnait très bien, de même pour des chambres de compression (haut rendement) avec du Supra.
Après ce long préambule, pour en venir au fait, c'est qu'il faut porter la plus grande attention au couplage ampli-enceintes. Encore plus s'il s'agit d'une configuration en bi-amplification et que vous avez voulu “marier“ des amplis différents.


Les enceintes et les électroniques déterminent chacun un facteur d'image. Parmi les enceintes, plusieurs d'entre elles en sont originellement dépourvues avec un son qui est tout en avant. C'est pourquoi nous avons constaté une évolution des constructeurs d'amplificateurs vers des amplis restituant le son tout en profondeur. Ces amplificateurs conviendront parfaitement à des enceintes ayant tendance à “projeter“ le son. Dans ces mêmes conditions une enceinte qui possèderait naturellement une image crédible verrait sa scène sonore reculer, ce qui frustrerait les amateurs de rock ou de jazz.


Pour aller au devant de toute frustration, il est très important que vous choisissiez votre ampli en fonction de vos enceintes et vis et versa. En hi-fi l’art de l’association est un des secrets. Pour vous le meilleur des amplis est celui qui fera le mieux fonctionner vos enceintes.
Pour terminer une petite anecdote vécue qui m’a laissé plein d’humilité. Il y a une quinzaine d’années je rédigeais une rubrique hi-fi pour un magazine de musique. J’avais entrepris de sacrer la chaîne de l’année au cours de trois bancs d’essais successifs : lecteurs de Cd, amplis et enceintes. Les trois bancs d’essais se déroulent avec bien-sur des lauréats et aussi des bonnets d’âne. J’étais convaincu d’avoir, dans ces sélections, trouvé des produits à éviter dans tous les cas.

Nous avons alors eu un conseil des rédacteurs auquel participaient plusieurs critiques musicaux assez connus. Ils se montrent bien-sur intéressés d'écouter la chaîne “gagnante“ puis on en vient à vouloir entendre ce que donnerait l’assemblage des plus mauvais éléments. Je me rappelle, il s’agissait d’un lecteur de CD Teac bas de gamme, un ampli Luxman et des enceintes Kef. L'assemblage des trois procurait un résultat ahurissant de qualité, ce qui a valu un flop retentissant à ma démonstration. La sècheresse (toute relative) des Teac et Luxman transcendait les mornes Kef. Depuis je suis devenu plus mesuré dans mes appréciations et très circonspect dans mes développements.

Un dernier point, ne choisissez pas un amplificateur trop puissant pour vos enceintes. Non pas par peur de les claquer, mais la puissance coûte cher et généralement il est plus difficile pour un constructeur de faire un amplificateur puissant et musical. Il faut seulement que son alimentation soit largement dimensionnée afin de conserver une certaine assise au son.

Jean-Claude Tornior