Quelques réflexions, sans doute originales, à l'attention des audiophiles

 

Préambule : Ces quelques lignes, je l'espère le plus accessible possible, n'ont pour but que d'amener l'audiophile à certaines réflexions qui pourront lui être bénéfique afin qu'il puisse prendre un peu de recul par rapport à un marché de plus en plus tourné vers une technologie au service du marketing, plus qu'au service de la reproduction musicale.

 

LE SON DANS NOTRE ENVIRONNEMENT :

Tout d'abord, qu'est le son ? Ce sont des vibrations de la pression de l'air. Sans air à une certaine pression, il ne peut pas y avoir de son. Notre pression atmosphérique est à environ 1Kg au niveau de la mer.

Le silence absolu s'établit donc à cette pression de 1Kg. En se souvenant de ses vieilles notions de physique, on se rappelle que l'on peut monter à plusieurs kilogs en pression, mais qu'il n'est pas possible de descendre en dépression au-delà du vide, soit environ -1Kg. Les variations de pression sonore s'articuleront en plus et moins de cette pression atmosphérique. Il est facile d'en déduire que les pics positifs et les pics négatifs de pression ne pourront pas avoir la même amplitude et que le signal ne sera pas symétrique en plus et en moins.

Cette situation explique plusieurs faits, que certains audiophiles ont pu constater, ou traditions pour lesquelles on a perdu les origines.

Ainsi, le choix de phase des haut-parleurs pour qu'ils “poussent“ en présence d'une tension continue appliquée selon leur polarité, ainsi que leur orientation avec un cône dont la déformation minimum sera aussi orientée vers une pression en poussée, découlent de cette situation.

On a aussi normalisé la mise en phase des microphones à l'enregistrement pour qu'ils traduisent une pression positive par un signal positif. De la même manière, on porte une attention particulière à ce que les tables de mixage, enregistreurs, préampli, amplificateurs, respectent cette “phase absolue“. Ainsi, on peut considérer que si vous avez respecté scrupuleusement le sens de branchement de vos haut-parleurs, rouge au rouge et noir au noir, votre écoute respecte scrupuleusement la phase de l'enregistrement. Souvent, le problème le plus délicat (même et surtout pour les professionnels) vient des liaisons symétriques, pour lesquelles la norme de phase reste aléatoire en raison d'un manque d'homogéneité des appareils concernant l'attribution des bornes 2 et 3 aux points chaud et froid (hot et cold en anglais).

Cette particularité de non symétrie des signaux (positifs et négatifs) est aussi affectée par les liaisons par condensateurs, dont la particularité est de bloquer la tension de polarisation pour ne transmettre que le signal alternatif qui se polarisera sur un autre potentiel, ce qui aura pour finalité de symétriser le signal.

Un autre cas de figure qui utilise ses défauts dans le bon sens : les amplificateurs à mono-tube de puissance. De par leur constitution, ils n'ont pas la même réactivité selon la phase du signal. Bien utilisé, cette spécificité peut procurer une excellente écoute musicale, malgré un niveau de distorsion proche de 1%.

Pour mémoire, j'ai aussi beaucoup utilisé des amplis Cabasse, dont la constitution assymétrique du différentiel et des drivers, en raison d'une importante résistance série pour commander le FET négatif de puissance leur configurait une réponse moins réactive sur les impulsions négatives que sur les impulsions positives.

 

NOTRE PERCEPTION HUMAINE DU SON :

Je m'excuse tout d'abord pour les raccourcis que je vais utiliser afin de ne pas rendre ce vaste sujet trop imcompréhensible.

Notre perception du son, si elle peut être très performante à bien des égards, n'en reste pas moins très sommaire à d'autres, ce qui permet aux procédés de compression de tromper habilement notre oreille. Elle peut être divisée en deux parties principales : nos capteurs sensitifs et notre système auditif.

Notre oreille physique a eu la charge de répondre à des exigences de survie qui ont été imposées à l'homme dès sa création. Ainsi, chasseur ou chassé, l'homme devait être attentif à toute activité extérieure, avec ou sans lumière. C'est sans doute pour cette raison que les trois résonateurs principaux qui constituent l'oreille physique ont un spectre de fréquence très spécialisé. 400 Hz pour la détermination de l'espace : extérieur, intérieur et dimensions des parois. 3000 Hz pour l'intelligibilité de la communication (Cochlée). Et enfin 5000 Hz pour la directivité.

Ces capteurs malheureusement perdent de leur souplesse avec l'age, ce qui est un peu compensé par notre système auditif.

Il faut aussi attirer l'attention sur la distance d'environ 15cm qui sépare les deux oreilles et détermine une stéréophonie de phase en dessous de 1500Hz (utilisée pour les procédés home-cinéma avec 2 HP) et d'intensité au dessus.

 

Notre système auditif est une sorte de logiciel qui utilise les pauvres informations délivrées par l'oreille, les compense et fournit à notre cerveau les informations corrigées. Ce système intelligent a ses propres performances, mais peut aussi être éduqué dans une certaine limites. Les audiophiles se sont généralement aperçus qu'au fil du temps et au fur et à mesure que les performances des capteurs faiblissaient, le système compensait avec une discrimination des différents sons souvent améliorée.

Différents exemples peuvent illustrer cet espèce de qualibrage automatique qu'exerce notre cerveau pour compenser les éventuels défauts récurants liés à une pièce ou à un système de reproduction. Qui n'a pas déménagé et connu l'angoisse de sa première écoute dans un nouveau local, avant que le système auditif ait corrigé l'équilibre de perception ? De même, quand on parle de rodage des câbles, ce phénomène existe, mais il est aussi complèté par le temps nécessaire à notre système auditif (calibré pour l'ancien câble) de s'adapter aux qualités de la nouvelle écoute.

Il existe aussi un dernier point, et non des moindres, qui rejoint notre précédente allusion au syndrome du chasseur. Notre oreille est capable de tout entendre et ce qu'elle entend le moins et qu'elle déteste, ce sont les signaux sinusoïdaux purs. Pourtant toute l'acoustique moderne est établie sur ce genre de signaux ou leur décomposition par l'analyse de Fourier. Notre système auditif sélectionne les signaux discontinus pour éliminer les signaux permanents. Elle est surtout sensible à l'impulsion. C'est ce qui explique les médiocres résultats obtenus par les egaliseurs automatiques. En effet, ceux-ci corrigent les signaux en fonction de l'acoustique de la pièce, c'est à dire sur l'onde réfléchie. Cette correction va pénaliser le signal à son émission, ce qui va perturber l'équilibre tonal que peut reconstituer notre système auditif.

Qui, à la campagne, ne s'est pas écrié "quel silence". Eh bien, vous seriez surpris par la valeur affichée par un sonomètre pour un tel silence.

Si vous vous faites réaliser un audiogramme, dès que vous arrivez dans les hautes fréquences, si vous manquez le moment ou le manipulateur commute le signal, vous n'entendez plus rien ou presque sur le signal sinusoïdal permanent. Notre système auditif n'est sensible qu'aux changements, c'est à dire aux impulsions.

Il y a quelques années, je me souviens que c'était à l'époque ou les malins anglais (Quad entre autre... Le fil avec du gain) prétendaient que les fréquences au-delà de 16 ou 20 000Hz ne servaient à rien et même nuisaient à la bonne musicalité de l'amplificateur. Cela pour vanter la disposition de filtres passe-bas dans leurs réalisations. Cela m'avait intrigué et j'avais voulu procéder à des expérimentations afin de vérifier cette hypothese. Pour être objectif, j'avais voulu ne pas tomber dans le même piège que le test d'audiogramme et d'expérimenter l'essai sur un signal complexe incorporant des fréquences élevées mais modulées à une fréquence plus basse de manière à être perçues selon le signal récurant et non comme fréquences pures. Notre conviction, toujours d'actualité, étant que si des signaux à 20000Hz constituants pour l'essentiel un autre signal que l'oreille pourrait percevoir, signifierai que ces signaux sont perçus par l'oreille, donc nécessaires pour l'intégrité du signal. Nous avons procédé à différentes écoute en faisant varier la bande passante, que ce soit en haut ou en bas. Le résultat que nous avons obtenu alors était qu'un amplificateur pour restituer une bande audible maximum se devait de reproduire des fréquences allant de 6 à 35000Hz pour ne pas limiter la restitution.

Ces constatations, nous ont amené depuis à considérer les éléments de restitution essentiellement en impulsion, en privilégiant une réponse impulsionnelle franche et non pas asservie, comme sur les amplis modernes à fort gain et forte contre-réaction.

 

J'espère ne pas avoir été trop long, ni trop hermétique. Ces quelques notes sont écrites sans prétention et rapportent différentes expériences que j'ai réalisé ou dont j'ai été le témoin. Si mes interprétations sont erronées, je ne demande qu'à écouter d'éventuels contradicteurs et corriger les erreurs. Cette vision du son, je l'espère, vous intéressera.

Salutations audiophiles.

Jean-Claude Tornior